19 Juin 2024
Un million de fois le volume du soleil en un mois
A côté des métazoaires aux anatomies souvent complexes existent des animaux beaucoup plus simples dont le corps est constitué d’une seule cellule : ce sont les unicellulaires.
Pour être plus précis, nous devons parler de protozoaires afin de bien faire la distinction avec d’autres unicellulaires, végétaux cette fois, qu’on nomme protophytes.
Nous ne chercherons pas à justifier ce cloisonnement parfois arbitraire entre cellules animales et cellules végétales ; nous nous contenterons de remarquer qu’en ce qui concerne la multiplication asexuée il n’y a pas de différences fondamentales entre protophytes et protozoaires.
Le mode de multiplication le plus fréquent chez les protozoaires est la simple bipartition de la cellule, c’est-à-dire la division de la cellule en deux parties égales.
Observant le phénomène au microscope, on assiste tout d’abord à une division du noyau ; nous connaissons tous ce petit organite cellulaire qui renferme des filaments nommés chromosomes dont le nombre reste invariable au sein de toutes les cellules d’une même espèce.
En réalité, lorsque le noyau se divise il ne s’agit pas d’un simple fractionnement de l’organite en deux parties : cela conduirait à une réduction de moitié du nombre de chromosomes à chaque division, fait incompatible avec la préservation du patrimoine héréditaire.
Avant que la cellule manifeste visiblement des velléités de division, elle double le nombre de ses chromosomes ; de cette manière la division du noyau reconstitue le nombre normal de chromosomes ; c’est là le processus commun à toutes les divisions cellulaires nommées mitoses.
Quoi qu’il en soit, la multiplication étant amorcée par l’apparition de deux noyaux, c’est maintenant au cytoplasme de se diviser en deux masses égales.
Nous sommes bientôt en présence de deux protozoaires rigoureusement semblables à celui qu’on avait au départ : la multiplication cellulaire rappelle beaucoup la scissiparité des métazoaires
La paramécie, petite cellule ciliée que bien peu de lycéen ignorent, se reproduit de cette façon ; lorsqu’on en fait l’observation au microscope on peut avoir la chance d’assister au phénomène, sans d’ailleurs en soupçonner la complexité ; les cellules allongées s’étranglent transversalement puis se séparent en deux parties à la manière d’une planaire qui se fragmente.
Pour peu que le milieu soit favorable (température et oxygénation suffisante) le rythme des divisions s’élève à 3 ou 4 par 24 heures.
Aussi n’est-il pas étonnant que ce protozoaires pullulent avec une rapidité déconcertante dans les flaques d’eau et dans les mares.
D’une cellule on passe à 2 puis 4, 8, 16, 32, etc. Ainsi, en progression géométrique, le nombre des individus s’accroît à une vitesse affolante. On a pu établir par le calcul qu’en un mois, à partir d’une seule paramécie, on pourrait obtenir un volume de matière vivante égal à un million de fois celui du soleil !
N’oublions pas cependant que cette croissance inouïe n’existe que sur la feuille de papier des mathématiciens ; non seulement le manque d’espace, mais aussi le manque de nourriture, d’oxygène, les conditions climatiques s’opposent toujours à une démographie aussi galopante !
Si un tel pouvoir de multiplication n’a pas lieu de nous inquiéter parce qu’il est toujours naturellement jugulé, n’oublions pas que certains protozoaires, qui sont parmi nos ennemis, prolifèrent aussi rapidement que la paramécie quand ils ont trouvé un bon terrain.
Le trypanosome de la maladie du sommeil transmis à l’homme par la mouche tsé-tsé se multiplie dans le sang et le liquide céphalo-rachidien de ses hôtes par simple division. Il n’a d’ailleurs pas besoin d’être présent en grande quantité pour provoquer des troubles qui vont en s’aggravant. Affaiblissement, amaigrissement, paralysie conjuguent progressivement leurs effets ; le sommeil qui atteint le malade le jour fait place à des insomnies la nuit, en attendant que la mort fasse son œuvre au bout de quelques années.
Les amibes sont aussi de ces protozoaires dont quelques espèces se réfugient chez l’homme.
Certaines d’entre elles vivent dans son intestin et se nourrissent surtout de bactéries : elles sont inoffensives. Une espèce par contre est responsable de la dysenterie amibienne, bien connue dans les pays chauds. Absorbée avec l’eau de boisson, ce protozoaire traverse la paroi intestinale où il s’attaque aux globules rouges ; il est quelquefois véhiculé par le sang et se loge en différentes parties du corps, le foie, les poumons, voire même le cerveau.
Sans vouloir multiplier les exemples, nous ne pouvons passer sous silence le cas d’une petite amibe plus connue par la maladie qu’elle provoque par son nom ; il s’agit de l’amibe du genre plasmodium, responsable du paludisme et qui bénéfice de l’involontaire complicité d’un moustique (l’anophèle) pour son développement. C’est sous la forme de sortes de spores (sporozoïtes) que le moustique inocule le parasite à sa victime au moment de la piqûre.
Les sporozoïtes ainsi injectés dans le sang pénètrent dans les globules rouges et se transforment en amibes. A l’intérieur des globules rouges les amibes grossissent et se divisent bientôt pour donner, non pas deux amibes chacune, mais une douzaines ! C’est alors que les globules rouges sont détruits et libèrent leurs 12 corpuscules prêts à coloniser d’autres globules rouges sains. Comme la destruction des globules s’accompagne de la mise en circulation des toxines sécrétées par le microbe et que le même phénomène se produit au même moment pour tous les globules parasités, le malade est atteint d’accès de fièvre dont le rythme dépend de la rapidité de la multiplication.
On connaît plusieurs espèces de plasmodium, chacune caractérisée par son rythme de multiplication. Dans la fièvre tierce l’accès fébrile survient toutes les 48 heures, dans la fièvre quarte c’est toutes les 72 heures. Le paludisme sévissait encore en France il y a moins d’un siècle ; il est toujours redouté en Afrique où il provoque de nombreux décès. Fort heureusement les sels de quinine sont une arme efficace contre le dangereux parasite dont on limite par ailleurs l’extension par la lutte contre anophèles.
La reproduction des hydres s’effectue par scissiparité : nous voyons ici le début de la division de l’animal qui va se séparer, à partir du pied, en deux branches longitudinales. Altas photo – Dragesco
Comme tous les protozoaires, la paramécie se reproduit par bipartition de la cellule initiale ; les deux nouvelles cellules sont de composition parfaitement identique. Jacana – K. Ross